Simenon, Georges - Monsieur Gallet, décédé
- Категория: Детективы и Триллеры / Полицейский детектив
- Автор: Simenon
- Год выпуска: неизвестен
- ISBN: нет данных
- Издательство: неизвестно
- Страниц: 17
- Добавлено: 2019-10-13 14:47:19
Simenon, Georges - Monsieur Gallet, décédé краткое содержание
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Georges Simenon
Monsieur Gallet,
décédé
Maigret III
I
Une corvée
La toute première prise de contact entre le commissaire Maigret et le mort, avec qui il allait vivre des semaines durant dans la plus déroutante des intimités, eut lieu le 27 juin 1930 en des circonstances à la fois banales, pénibles et inoubliables.
Inoubliables surtout parce que, depuis une semaine, la Police judiciaire recevait note sur note annonçant le passage à Paris du roi d’Espagne pour le 27 et rappelant les mesures à prendre en pareil cas.
Or, le directeur de la PJ était à Prague, où il assistait à un congrès de police scientifique. Le sous-directeur avait été appelé dans sa villa de la côte normande par la maladie d’un de ses gosses.
Maigret était le plus ancien des commissaires et devait s’occuper de tout, par une chaleur suffocante, avec des effectifs que les vacances réduisaient au minimum.
Ce fut encore le 27 juin au petit jour qu’on découvrit, rue de Picpus, une mercière assassinée.
Bref, à neuf heures du matin, tous les inspecteurs disponibles étaient partis pour la gare du Bois-de-Boulogne, où l’on attendait le souverain espagnol.
Maigret avait fait ouvrir portes et fenêtres et, sous l’action des courants d’air, les portes claquaient, les papiers s’envolaient des tables.
A neuf heures et quelques minutes arrivait un télégramme de Nevers :
Emile Gallet, voyageur de commerce, domicilié à Saint-Fargeau, Seine-et-Marne, assassiné nuit du 25 au 26, Hôtel de la Loire, à Sancerre. Nombreux détails étranges. Prière prévenir famille pour reconnaissance cadavre. Si possible envoyer inspecteur de Paris.
Maigret n’eut d’autre ressource que d’aller lui-même à Saint-Fargeau, dont, une heure plus tôt, il ne connaissait même pas l’existence à trente-cinq kilomètres de la capitale.
Il ignorait l’heure des trains. Comme il arrivait à la Gare de Lyon, on lui dit qu’un omnibus partait à l’instant ; il se mit à courir et eut juste le temps de se jeter dans le dernier wagon.
Cela suffit à le mettre en nage. Il passa le reste du voyage à reprendre sa respiration et à s’éponger, car il était corpulent.
A Saint-Fargeau, il fut le seul voyageur à descendre et il dut errer plusieurs minutes sur le bitume amolli du quai avant de dénicher un employé.
— M. Gallet ?… Tout au bout de l’allée centrale du lotissement… Il y a une plaque sur la villa et il est écrit Les Marguerites… D’ailleurs, c’est à peu près la seule construction achevée…
Maigret retira son veston, glissa un mouchoir sous son chapeau melon afin de protéger sa nuque, car l’allée en question avait dans les deux cents mètres de large et n’était praticable qu’en son milieu, où il n’y avait pas la moindre tache d’ombre.
Le soleil était d’une triste couleur de cuivre. Les mouches piquaient rageusement, annonçant l’orage.
Pas une âme pour égayer le décor et renseigner le voyageur.
Le lotissement n’était pas autre chose qu’une vaste forêt qui avait dû faire partie d’un domaine seigneurial. On s’était contenté d’y tracer un réseau d’allées géométriques, comme à coups de tondeuse, et d’y faire courir les câbles électriques qui alimenteraient en lumière les futures villas.
En face de la gare, cependant, un square était aménagé, avec vasques de mosaïque et jets d’eau. Sur une baraque en planches on lisait : Bureau de vente des terrains. Et à côté figurait un plan où ces allées désertes avaient déjà des noms d’hommes politiques et de généraux.
Tous les cinquante mètres, Maigret retirait son mouchoir pour s’éponger, puis le remettait sur sa nuque qui commençait à rissoler.
De-ci de-là, il voyait des embryons de constructions, des pans de murs que les maçons devaient avoir abandonnés à cause de la chaleur.
A deux kilomètres de la gare pour le moins, il trouva les Marguerites, une villa de style vaguement anglais, aux tuiles rouges, à l’architecture compliquée, au mur rustique séparant le jardin de ce qui, pour quelques années, était encore la forêt.
Par les baies du premier étage, il aperçut un lit supportant un matelas plié en deux. Les couvertures s’aéraient sur l’appui de fenêtre.
Il sonna. Une servante d’une trentaine d’années, qui louchait, le regarda d’abord à travers un judas, et, pendant qu’elle se décidait à ouvrir la porte, Maigret endossa son veston.
— Mme Gallet, s’il vous plaît ?…
— De la part de qui ?…
Mais déjà une voix, à l’intérieur, questionnait :
— Qu’est-ce que c’est, Eugénie ?
Et Mme Gallet se montrait en personne sur le perron, attendant, le menton haut, les explications de l’intrus.
— Vous perdez quelque chose ! remarqua-t-elle sans amabilité, comme il retirait son chapeau en oubliant le mouchoir qui tombait par terre.
Il le ramassa en mâchonnant des syllabes inintelligibles, se présenta :
— Commissaire Maigret, de la première Brigade mobile. Je voudrais vous dire quelques mots, madame…
— A moi ?
Et, se tournant vers la bonne :
— Qu’attendez-vous, vous ?
Sur Mme Gallet, du moins, Maigret était désormais fixé. C’était une femme d’une cinquantaine d’années, franchement désagréable. Malgré l’heure, la chaleur, la solitude de la villa, elle était déjà armée d’une robe de soie mauve et pas un de ses cheveux gris ne sortait d’un rigide alignement. Enfin le cou, le corsage et les mains avaient leur plein de chaînes d’or, de broches et de bagues cliquetantes.
Elle précéda à regret le visiteur au salon. En passant devant une porte entrouverte, Maigret plongea le regard dans une cuisine blanche où étincelaient des cuivres et des aluminiums.
— Est-ce que je peux commencer à encaustiquer, madame ?
— Naturellement ! Pourquoi pas ?
La domestique disparut dans la salle à manger voisine et on l’entendit bientôt étendre la cire, agenouillée sur le plancher, tandis qu’une vivifiante odeur de térébenthine se répandait dans la maison.
Sur tous les meubles du salon, il y avait de la broderie. Au mur, le portrait agrandi d’un gamin long et maigre, aux genoux saillants, au visage antipathique, en costume de première communion.
Sur le piano, une photographie plus petite représentant un homme aux cheveux drus, à la barbiche poivre et sel, qui portait une jaquette dont les épaules étaient mal coupées.
L’ovale de son visage était aussi allongé que celui du gamin. Un autre détail choquait et Maigret mit quelques instants à comprendre que c’étaient les lèvres qui coupaient presque la figure en deux et qui étaient d’une minceur anormale.
— Votre mari ?
— Mon mari, oui ! J’attends de savoir ce que la police vient faire ici…
Pendant la conversation qui suivit, Maigret devait reporter souvent son regard sur le portrait et ce fut à proprement parler sa première prise de contact avec le mort.
— J’ai une mauvaise nouvelle à vous annoncer, madame… Votre mari est en voyage, n’est-ce pas ?
— Eh bien ! Parlez… Est-ce que…
— Un accident est arrivé, oui… Pas tout à fait un accident… Je vous demande d’être courageuse…
Elle se tenait toute droite devant lui, la main posée sur un guéridon qui supportait un faux bronze. Son visage était dur, méfiant, et il n’y avait que ses doigts grassouillets à s’agiter. Pourquoi Maigret fit-il la réflexion qu’elle avait certainement été mince, peut-être même très mince, pendant la première moitié de sa vie, et qu’elle ne s’était empâtée qu’avec l’âge ?
— Votre mari a été assassiné à Sancerre, pendant la nuit du 25 au 26… C’est à moi que revient la tâche pénible de…
Le commissaire se tourna vers le portrait, questionna en désignant le premier communiant :
— Vous avez un fils ?
Un instant, Mme Gallet parut sur le point de perdre cette raideur qu’elle jugeait indispensable à sa dignité. Elle dit du bout des lèvres :
— Un fils, oui…
Puis aussitôt, la voix triomphante :
— Vous avez bien dit Sancerre, n’est-ce pas ?… Et nous sommes le 27… Dans ce cas, vous faites erreur… Attendez…
Elle passa dans la salle à manger, où Maigret aperçut la servante à quatre pattes. Lorsqu’elle revint, elle tendit une carte postale au visiteur.
— Cette carte est de mon mari… Elle porte la date du 26, c’est-à-dire d’hier, et le cachet de la poste de Rouen…
Elle avait peine à réprimer un sourire trahissant sa joie d’humilier la police qui se permettait de pénétrer chez elle.
— Il s’agit sans doute d’un autre Gallet, quoique je n’en connaisse pas…
Pour un peu, elle eût ouvert la porte, qu’elle ne pouvait s’empêcher de regarder.
— Le prénom de votre mari est Emile ? Et ses pièces d’identité lui donnent comme profession voyageur de commerce ?
— Il est l’agent de la Maison Niel et Cie pour toute la Normandie !
— Je crains, madame, que vous vous réjouissiez à tort… Je suis obligé de vous prier de m’accompagner à Sancerre… Pour vous comme pour moi…
— Mais puisque…
Elle secouait la carte, qui représentait le vieux marché de Rouen. La porte de la salle à manger n’avait pas été refermée et l’on voyait tantôt la croupe et les pieds de la bonne, tantôt sa tête et ses cheveux qui cachaient son visage. On entendait sur les planches le glissement du chiffon gras de cire.
— Croyez que je souhaite de tout cœur qu’il y ait erreur. Néanmoins, les papiers trouvés dans les poches du mort sont bien ceux de votre mari…
— On a pu les lui voler…
L’inquiétude, pourtant, commençait à percer dans sa voix, malgré elle. Elle suivit le regard que Maigret lançait au portrait, remarqua :
— Cette photo a été prise quand il était déjà au régime…
— Si vous voulez déjeuner, dit le commissaire, je viendrai vous prendre dans une heure, par exemple…
— Pas du tout… Si vous croyez que… qu’il le faut… Eugénie !… Mon manteau de soie noire, mon sac et mes gants…
Maigret ne prenait aucun intérêt à l’affaire, qui avait toutes les caractéristiques de l’affaire désagréable par excellence. Et, s’il gardait à la mémoire l’image de l’homme à barbiche - qui était au régime ! - et du gamin en costume de premier communiant, c’était à son insu.
Toutes ses démarches avaient des allures de corvée. Redescendre, dans une atmosphère de plus en plus étouffante, la fameuse allée centrale d’abord, sans pouvoir, cette fois, retirer son veston. Attendre trente-cinq minutes sur un banc de la gare de Melun, où il acheta un panier contenant des sandwiches, des fruits et une bouteille de bordeaux.
A trois heures de l’après-midi, il était installé, en face de Mme Gallet, dans un compartiment de première classe, et il roulait sur la grande ligne de Moulins, qui passe à Sancerre.
Les rideaux étaient fermés, les vitres baissées, mais ce n’était que de loin en loin qu’on recevait un petit souffle d’air frais.
Maigret avait tiré sa pipe de sa poche, puis il avait regardé sa compagne et il avait abandonné l’idée de fumer en sa présence.
Le train roulait depuis une bonne heure quand elle questionna d’une voix enfin plus humaine :
— Comment expliqueriez-vous cela ?
— Jusqu’ici, je ne puis rien expliquer, madame. Je ne sais rien. Comme je vous l’ai dit, le crime a été commis dans la nuit du 25 au 26, à l’Hôtel de la Loire.
» Nous sommes en période de vacances… Au surplus, les parquets de province ne sont pas toujours pressés… La Police judiciaire n’a été avertie que ce matin…
» Votre mari avait-il l’habitude de vous envoyer des cartes postales ?
— Chaque fois qu’il était absent.
— Il voyageait beaucoup ?
— Trois semaines par mois environ. Il allait à Rouen, où il descendait à l’Hôtel de la Poste… Depuis vingt ans !… De là, il rayonnait dans toute la Normandie, mais il s’arrangeait autant que possible pour rentrer le soir à Rouen.
— Vous n’avez qu’un fils ?
— Un fils, oui ! Il s’occupe de banque, à Paris…
— Il ne vit pas avec vous à Saint-Fargeau ?
— C’est trop loin pour qu’il revienne chaque jour. Il passe tous les dimanches avec nous…
— Puis-je vous conseiller de manger quelque chose ?
— Merci ! laissa-t-elle tomber du même ton qu’elle eût relevé une impertinence.
Et, en effet, il la voyait mal grignotant un sandwich comme la première venue, buvant du vin tiédi dans le gobelet de papier huilé de la compagnie.
On sentait que pour elle la dignité n’était pas un vain mot. Elle n’avait jamais dû être jolie, mais elle avait des traits réguliers et, moins figée, elle n’eût pas été sans charme, grâce à une certaine mélancolie qu’exprimait sa physionomie et que soulignait sa façon de tenir la tête penchée de côté.
— Pourquoi aurait-on tué mon mari ?
— Vous ne lui connaissez pas d’ennemi ?
— Ni ennemi ni ami ! Nous vivons à l’écart, comme tous ceux qui ont connu une autre époque que l’époque brutale et vulgaire d’après guerre…
— Ah !…
Le voyage était interminable. A plusieurs reprises, Maigret alla dans le couloir tirer quelques bouffées de sa pipe. Son faux col s’était amolli sous l’action de la chaleur et de sa transpiration abondante. Il enviait Mme Gallet qui ne s’apercevait même pas des trente-trois ou trente-quatre degrés à l’ombre et qui gardait exactement la pose qu’elle avait adoptée au départ, comme pour un déplacement en autobus, le sac posé sur les genoux, les mains sur le sac, la tête un tant soit peu tournée vers la portière.
— Comment ce… cet homme a-t-il été tué ?
— Le télégramme ne le dit pas… Je crois comprendre qu’on l’a trouvé mort le matin…
Mme Gallet eut un haut-le-corps, fut un moment, la bouche entrouverte, à chercher sa respiration.
— C’est impossible que ce soit mon mari… Cette carte est une preuve, n’est-ce pas ?… Je n’aurais même pas dû me déranger…
Sans savoir au juste pourquoi, Maigret regretta de n’avoir pas pris la photographie sur le piano, car déjà il avait de la peine à reconstituer dans sa mémoire le haut du visage. Par contre, il revoyait nettement la bouche trop longue, la barbiche drue, les épaules mal taillées de la jaquette.
Il était sept heures du soir quand le train s’arrêta en gare de Tracy-Sancerre, et il fallut parcourir encore un kilomètre sur la grand-route, traverser le pont suspendu qui enjambe la Loire.
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