Simenon, Georges - Lombre chinoise Страница 3
- Категория: Детективы и Триллеры / Полицейский детектив
- Автор: Simenon
- Год выпуска: неизвестен
- ISBN: нет данных
- Издательство: неизвестно
- Страниц: 15
- Добавлено: 2019-10-13 14:47:22
Simenon, Georges - Lombre chinoise краткое содержание
Прочтите описание перед тем, как прочитать онлайн книгу «Simenon, Georges - Lombre chinoise» бесплатно полную версию:Il était dix heures du soir. Les grilles du square étaient fermées, la place des Vosges, avec les pistes luisantes des voitures tracées sur l'asphalte et le chant continu des fontaines, les arbres sans feuilles et la découpe monotone sur le ciel des toits tous pareils. Sous les arcades, qui font une ceinture prodigieuse à la place, peu de lumière. A peine trois ou quatre boutiques. Le commissaire Maigret vit une famille qui mangeait dans l'une d'elles, encombrée de couronnes mortuaires en perles. Il essayait de lire les numéros au-dessus des portes, mais à peine avait-il dépassé la boutique aux couronnes qu'une petite personne sortit de l'ombre. - C'est à vous que je viens de téléphoner ? Il devait y avoir longtemps qu'elle guettait. Malgré le froid de novembre, elle n'avait pas passé de manteau sur son tablier. Son nez était rouge, ses yeux inquiets.
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« Je n’ai jamais imaginé qu’il ne viendrait pas… J’avais encore un peu d’argent dans mon sac… En l’attendant, au Select, j’ai mangé des huîtres, puis de la langouste… J’ai téléphoné… C’est en arrivant ici que je me suis aperçue qu’il me restait juste de quoi payer mon taxi…
— Et chez vous ?
— Je suis à l’hôtel…
— Je vous demande si vous avez un peu d’argent de côté…
— Moi ?
Un petit rire nerveux.
« Pour quoi faire ?… Est-ce que je pouvais prévoir ?… Même si j’avais su, je n’aurais pas voulu… »
Maigret soupira.
« Venez avec moi jusqu’au boulevard Beaumarchais. Il n’y a que là que vous trouverez un taxi à cette heure. Qu’est-ce que vous allez faire ?
— Rien… je… »
N’empêche qu’elle frissonna. Il est vrai qu’elle n’était vêtue que de soie.
« Il n’avait pas fait de testament ?
— Est-ce que je sais, moi ?… Est-ce que vous croyez qu’on s’occupe de ces choses-là quand tout va bien ?… Raymond était un chic type… Je… »
Elle pleurait tout en marchant, sans bruit. Le commissaire lui glissa un billet de cent francs dans la main, fit signe à une voiture qui passait, grommela en enfonçant les poings dans ses poches :
« À demain… C’est bien hôtel Pigalle que vous m’avez dit ? »
Quand il se coucha, Mme Maigret ne s’éveilla que juste le temps de murmurer dans une demi-conscience :
« Tu as dîné, au moins ? »
III
LE COUPLE DE PIGALLE
En sortant de chez lui, vers huit heures du matin, Maigret avait le choix entre trois démarches qui, toutes trois, devaient être faites ce jour-là : revoir les locaux de la place des Vosges et interroger le personnel ; rendre visite à Mme Couchet, qui avait été mise au courant des événements par la police du quartier, et enfin questionner à nouveau Nine.
Dès son réveil, il avait téléphoné à la Police judiciaire la liste des locataires de la maison, ainsi que de toutes les personnes mêlées de près ou de loin au drame et, quand il passerait à son bureau, des renseignements détaillés l’attendraient.
Le marché battait son plein, boulevard Richard-Le-noir. Il faisait si froid que le commissaire releva le col de velours de son pardessus. La place des Vosges était proche, mais il fallait s’y rendre à pied.
Or, un tramway passait en direction de la place Pigalle et c’est ce qui décida Maigret. Il verrait d’abord Nine.
Bien entendu, elle n’était pas levée. Au bureau de l’hôtel, on le reconnut et on s’inquiéta.
« Elle n’est pas mêlée à une histoire embêtante, au moins ? Une fille si tranquille !
— Elle reçoit beaucoup ?
— Rien que son ami.
— Le vieux ou le jeune ?
— Elle n’en a qu’un. Ni vieux ni jeune… »
L’hôtel était confortable, avec ascenseur, téléphone dans les chambres. Maigret fut déposé au troisième étage, frappa au 27, entendit quelqu’un remuer dans un lit, puis une voix balbutier : « Qu’est-ce que c’est ?
— Ouvrez, Nine ! »
Une main dut sortir des couvertures, atteindre le verrou. Maigret pénétra dans la pénombre moite, aperçut le visage chiffonné de la jeune femme, alla tirer les rideaux.
« Quelle heure est-il ?
— Pas encore neuf heures… Ne vous dérangez pas… »
Elle fermait à demi les yeux, à cause de la lumière crue. Telle quelle, elle n’était pas jolie et elle avait davantage l’air d’une petite fille de la campagne que d’une coquette. Deux ou trois fois elle se passa la main sur le visage, finit par s’asseoir sur le lit en se faisant un dossier de l’oreiller. Enfin elle décrocha le téléphone.
« Vous me servirez le petit déjeuner ! »
Et, à Maigret :
« Quelle histoire !… Vous ne m’en voulez pas de vous avoir tapé, hier au soir ?… C’est bête !… Il faudra que j’aille vendre mes bijoux…
— Vous en avez beaucoup ? »
Elle désigna la toilette où, dans un cendrier-réclame, il y avait quelques bagues, un bracelet, une montre, le tout valant à peu près cinq mille francs.
On frappait à la porte de la chambre voisine et Nine tendit l’oreille, esquissa un vague sourire en entendant frapper à nouveau avec insistance.
« Qui est-ce ? questionna Maigret.
— Mes voisins ? Je ne sais pas ! Mais si on parvient à les réveiller à cette heure-ci…
— Que voulez-vous dire ?
— Rien ! Ils ne se lèvent jamais avant quatre heures de l’après-midi, quand ils se lèvent !
— Ils se droguent ? »
Ses cils battirent affirmativement, mais elle s’empressa d’ajouter :
« Vous n’allez pas profiter de ce que je vous dis, n’est-ce pas ? »
La porte avait cependant fini par s’ouvrir. Celle de Nine aussi et une femme de chambre apportait le plateau avec le café au lait et les croissants.
« Vous permettez ? »
Elle avait les yeux cernés et sa chemise de nuit laissait voir des épaules maigres, un petit sein pas très ferme de gamine mal poussée. Tandis qu’elle mettait des morceaux de croissant à tremper dans son café au lait, elle continuait à tendre l’oreille comme si, malgré tout, elle eût été intéressée par ce qui se passait à côté.
« Est-ce que je serai mêlée à l’histoire ? dit-elle néanmoins. Ce serait embêtant, si on parlait de moi dans les journaux ! Surtout pour Mme Couchet… »
Et, comme on frappait à la porte de petits coups faibles mais précipités, elle cria :
« Entrez ! »
C’était une femme d’une trentaine d’années, qui avait passé un manteau de fourrure sur sa chemise de nuit et dont les pieds étaient nus. Elle faillit battre en retraite en apercevant le large dos de Maigret, puis elle s’enhardit, balbutia :
« Je ne savais pas que vous aviez du monde ! »
Le commissaire tressaillit en entendant cette voix traînante, qui semblait sortir difficilement d’une bouche trop pâteuse. Il regarda la femme qui refermait la porte, vit un visage sans couleur, aux paupières bouffies. Un coup d’œil à Nine le confirma dans son idée. C’était bien la voisine aux stupéfiants.
« Qu’est-ce qui vous arrive ?
— Rien ! Roger a une visite… Alors… Je me suis permis… »
Elle s’assit au pied du lit, abrutie, soupira comme Nine l’avait fait :
« Mais quelle heure est-il ?
— Neuf heures ! dit Maigret. Vous avez l’air de ne pas aimer la cocaïne, vous !
— Ce n’est pas de la cocaïne… C’est de l’éther… Roger prétend que c’est meilleur et que… »
Elle avait froid. Elle se leva pour aller se coller au radiateur, regarda dehors.
« Il va encore pleuvoir… »
Tout cela était morne, découragé. Sur la toilette, le peigne était plein de cheveux cassés. Les bas de Nine traînaient par terre.
« Je vous dérange, n’est-ce pas ?… Mais il paraît que c’est important… Il s’agit du père de Roger, qui est mort… »
Maigret regardait Nine et il remarqua qu’elle fronçait soudain les sourcils comme quelqu’un qui est frappé par une idée. Au même instant, la femme qui venait de parler portait la main à son menton, réfléchissait, murmurait :
« Tiens ! Tiens ! »
Et le commissaire de questionner :
« Vous connaissez le père de Roger ?
— Je ne l’ai jamais vu… Mais… Attendez !… Dites donc, Nine, il n’est rien arrivé à votre ami ? »
Nine et le commissaire échangèrent un regard.
« Pourquoi ?
— Je ne sais pas… Cela s’embrouille un peu… Je pense tout à coup qu’un jour Roger m’a dit que son père fréquentait dans la maison… Cela l’amusait… Mais il aimait mieux ne pas le rencontrer et, une fois que quelqu’un montait l’escalier, il est rentré précipitamment dans la chambre… Or, il me semble que la personne en question est entrée ici… »
Nine ne mangeait plus. Elle était embarrassée par le plateau qu’elle avait sur les genoux et son visage trahissait l’inquiétude.
« Son fils ?… dit-elle lentement, le regard fixé sur le rectangle glauque de la fenêtre.
— Mais alors !… s’écriait l’autre… Alors, c’est votre ami qui est mort !… Il paraît qu’il s’agit d’un crime…
— Roger Couchet, oui ! »
Ils se taisaient tous les trois, troublés.
« Qu’est-ce qu’il fait ? reprit le commissaire après une longue minute pendant laquelle on entendit un murmure de voix dans la chambre voisine.
— Comment ?
— Quelle est sa profession ? »
Et la jeune femme, soudain :
« Vous êtes de la police, n’est-ce pas ? »
Elle était agitée. Peut-être allait-elle reprocher à Nine de l’avoir attirée dans un piège.
« Le commissaire est très gentil ! dit Nine en sortant une jambe de son lit et en se penchant pour saisir ses bas.
— J’aurais dû m’en douter !… Mais alors, vous saviez déjà avant que… que j’arrive…
— Je n’avais jamais entendu parler de Roger ! dit Maigret. Maintenant, il faut que vous me donniez quelques renseignements sur lui…
— Je ne sais rien… Il y a à peine trois semaines que nous sommes ensemble…
— Et avant ?
— Il était avec une grande rousse qui se fait passer pour manucure…
— Il travaille ? »
Ce mot-là suffit à rendre la gêne plus sensible.
« Je ne sais pas…
— Autrement dit, il ne fait rien… Il a de la fortune ?… Il vit largement ?…
— Non ! Nous mangeons presque toujours dans un « prix fixe » à six francs…
— Il parle souvent de son père ?
— Il n’en a parlé qu’une fois, comme je vous l’ai dit…
— Voulez-vous me décrire son visiteur ? Vous l’aviez déjà rencontré ?
— Non ! C’est un homme… Comment dirai-je ? Je l’ai pris pour un huissier et quand je suis venue ici, je croyais que c’était cela et que Roger avait des dettes…
— Il est bien habillé ?
— Attendez… J’ai vu un chapeau melon, un pardessus beige, des gants… »
Il y avait, entre les deux chambres, une porte de communication cachée par un rideau et probablement condamnée. Maigret eût pu y coller l’oreille et tout entendre, mais il répugnait à le faire devant les deux femmes.
Nine s’habillait, se contentait, en guise de toilette, de passer une serviette mouillée sur son visage. Elle était nerveuse. Ses gestes étaient saccadés. On sentait que les événements la dépassaient, que maintenant elle s’attendait à tous les malheurs, qu’elle ne se sentait pas la force de réagir, ni même de comprendre.
L’autre était plus calme, peut-être parce qu’elle était encore sous l’action de l’éther, peut-être parce qu’elle avait davantage l’expérience de ces sortes de choses.
« Comment vous appelez-vous ?
— Céline.
— Vous avez une profession ?
— J’étais coiffeuse à domicile.
— Inscrite au registre de la police des mœurs ? » Elle secoua négativement la tête, sans s’indigner. Et on entendait toujours un murmure de voix, à côté.
Nine, qui avait passé une robe, regardait la chambre autour d’elle et soudain éclatait en sanglots, balbutiait : « Mon Dieu ! Mon Dieu !
— C’est une drôle d’histoire ! disait lentement Céline. Et, s’il s’agit vraiment d’un crime, on va être bien embêtés…
— Où étiez-vous hier vers huit heures du soir ? »
Elle réfléchit.
« Attendez… Huit heures… Eh bien ! j’étais au Cyrano…
— Roger vous accompagnait ?
— Non… On ne peut tout de même pas être tout le temps ensemble… Je l’ai retrouvé à minuit, au tabac de la rue Fontaine…
— Il vous a dit d’où il venait ?
— Je ne lui ai rien demandé… »
Par la fenêtre, Maigret apercevait la place Pigalle, son square minuscule, les enseignes des boîtes de nuit. Soudain, on le vit se redresser, marcher vers la porte.
« Attendez-moi toutes les deux ! »
Et il sortit, frappa à la porte voisine dont il tourna aussitôt le bouton.
Un homme en pyjama était assis dans l’unique fauteuil de la chambre où, malgré la fenêtre ouverte, il régnait une écœurante odeur d’éther. Un autre marchait en gesticulant. C’était M. Martin, que Maigret avait rencontré par deux fois la veille, dans la cour de la place des Vosges.
◊
« Tiens, vous avez retrouvé votre gant ! »
Et Maigret regardait les deux mains du fonctionnaire de l’Enregistrement, qui devint si pâle que le commissaire crut un instant qu’il allait s’évanouir. Ses lèvres tremblaient. Il essayait de parler sans y parvenir.
« Je… je… »
Le jeune homme n’était pas rasé. Il avait un teint de papier mâché, des yeux bordés de rouge et des lèvres molles qui trahissaient sa veulerie. Il était occupé à boire avidement de l’eau dans le verre à dents.
« Remettez-vous, monsieur Martin ! Je n’espérais pas vous rencontrer ici, surtout à l’heure où votre bureau doit être ouvert depuis longtemps. »
Il observait le bonhomme des pieds à la tête. Il devait faire un effort pour ne pas avoir pitié, tant le malheureux manifestait de désarroi.
Depuis les chaussures jusqu’à la cravate montée sur un appareil en celluloïd, M. Martin était le prototype du fonctionnaire des caricatures. Un fonctionnaire propret et digne, aux moustaches bien cirées, sans un grain de poussière sur les vêtements, qui se serait sans doute cru déshonoré en sortant les mains nues.
Maintenant, il ne savait qu’en faire, de ses mains, et son regard fouillait les coins de la chambre en désordre comme pour y trouver une inspiration.
« Vous me permettez une question, monsieur Martin ? Depuis combien de temps connaissez-vous Roger Couchet ?
Ce ne fut plus de la terreur. Ce fut de l’ahurissement.
« Moi ?
« Oui, vous !
— Mais… depuis… depuis mon mariage ! »
Il disait cela comme si la chose eût été évidente par elle-même.
« Je ne comprends pas !
— Roger est mon beau-fils… Le fils de ma femme…
— Et de Raymond Couchet ?
— Mais oui… Puisque… »
Il reprenait de l’assurance.
« Ma femme a été la première femme de Couchet… Elle a eu un fils, Roger… Quand elle a divorcé, je l’ai épousée… »
Cela faisait l’effet d’une bourrasque qui balaie un ciel de nuages. La maison de la place des Vosges en était transformée. Le caractère des événements changeait. Certains points devenaient plus clairs. D’autres, au contraire, étaient plus troubles, plus inquiétants.
Au point que Maigret n’osait plus parler. Il avait besoin de mettre de l’ordre dans ses idées. Il regardait tour à tour les deux hommes avec une inquiétude croissante.
La nuit même, la concierge lui avait demandé en regardant toutes les fenêtres qu’on apercevait de la cour :
« Croyez-vous que ce soit quelqu’un de la maison ?… »
Жалоба
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